DES ÉPINES ET DES ROSES
Le 9 octobre 2025, Robert Badinter est entré au Panthéon. Un avocat, un homme, une conscience morale.
Avant lui, ses maîtres : Zola, Victor Hugo, Condorcet, tous convaincus que la justice doit laisser à l’homme une chance de devenir meilleur.
Depuis la réforme historique de notre justice, son nom semblait désigné d’avance pour rejoindre ce « saint des saints » laïc, où reposent les grandes figures de la République.
Mais cet hommage dépasse l’homme ; il touche à l’idée même d’humanité.
Badinter fut de ceux qui n’ont jamais défendu le crime, il a défendu la vie.
Sa famille, venue de Bessarabie, l’actuelle Moldavie, portait dans son sang l’amour d’une France universelle.
Son père, Simon, étudiant à Moscou avant la Révolution d’Octobre, parlait un français parfait, nourri de Hugo et de Stendhal.
Cette filiation n’était pas un hasard : c’était une transmission d’idéal.
L’enfant Badinter apprit tôt que la justice n’est pas une institution, mais une respiration morale ; que le droit n’est pas une forteresse, mais un outil pour révéler l’unité cachée derrière chaque souffle.
Et en ce 1 Novembre 2025, alors que son nom résonne désormais sous la voûte du Panthéon, son esprit continue de nous murmurer ceci :
La justice n’est grande que lorsqu’elle croit encore en l’homme.
L’art est la réverbération d’une vie impermanente.
Les êtres passent, les œuvres demeurent.
Elles sont nos empreintes sur le sable du temps, nos murmures contre l’oubli.
Du David de Michel-Ange aux peintures rupestres, du dessin maladroit d’un enfant sur le mur d’une école jusqu’à un graffiti anonyme dans une gare, tout cela crie la même chose : J’étais là.
Créer, c’est tendre la main à l’invisible.
C’est dire au monde : regarde, voici un fragment de mon humanité. Et lorsque cette offrande rencontre un autre regard, quelque chose d’invisible se passe : la solitude se fissure.
Nous croyons produire des œuvres ; en réalité, ce sont les œuvres qui nous relient.
Elles abolissent les frontières du langage pour révéler ce que nous savions avant même de naître : il n’y a pas de séparation.
Nous ne faisons qu’un.
Le musicien Charles Mingus disait :
« Rendre compliqué ce qui est simple est à la portée de tout le monde. La créativité, c’est de rendre simple ce qui est compliqué, extraordinairement simple. »
Cette vérité traverse les arts, les sciences, la politique et le droit.
Artisans, artistes, avocats, intellectuels, hommes et femmes, tous façonnent le monde avec leurs outils, leurs expériences, leurs savoirs.
Notre devoir commun : rendre la vie extraordinairement simple, sans la réduire, mais en la clarifiant.
Être avocat, c’est participer à cette œuvre.
C’est écouter, accompagner, soutenir l’humain pour défendre la vie.
Ce n’est pas seulement plaider, c’est réparer, raccorder, parfois racheter.
Car l’avocat n’est pas un orateur en toge : c’est un artisan de vérité, un passeur de lumière entre le droit et l’humain.
Il se demande sans cesse : Comment faire mieux ?
Mieux comprendre, mieux servir, mieux aimer.
C’est peut-être cela, au fond, l’art d’imaginer l’entier : se souvenir que le droit n’est qu’un instrument, mais que la justice est une relation.
Un jour, dans un jardin, une rose se plaignait à une épine.
« Tu piques, tu blesses, tu fais fuir. À cause de toi, nul n’ose m’approcher. »
L’épine répondit doucement :
« Sans moi, ma chère, on te cueillerait sans vergogne. Je suis ta douleur, mais je suis aussi ta protection. »
Le vent, témoin discret, murmura :
« C’est dans la danse fragile de vos contraires que naît la beauté. »
Les grandes épreuves de la vie révèlent notre humanité et notre unicité.
L’adversité ne nous détruit pas : elle nous dessine.
Imagine, deviens meilleur, reste entier, inspire.
Et souviens-toi : Dans la vie, nous avons eu bien des soucis… qui ne se sont jamais produits.
On s’invente tant d’histoires qui n’arrivent jamais.
Car en vérité, nous ne faisons qu’un.
🌹 Fin et début ...